Par le Dr Florent RICHARD, M.D
Des millions de personnes souffrent de pathologies chroniques liées à la sédentarité et au manque d’activités physiques : diabète de type 2, syndrome métabolique incluant le surpoids voire l’obésité, rhumatismes notamment mal de dos et sciatique, anxiété, troubles du sommeil, dépression, cancer. (1)
Le terme « Chronique » signifie que cela dure depuis au moins 6 mois voire plusieurs années. Concernant le mal de dos cela signifie qu’il dure quotidiennement depuis au moins 3 mois.
Tous les patients qui rencontrent dans leur vie ces problèmes de façon chronique doivent un jour ou l’autre pratiquer une activité physique régulière et suffisante pour soulager leurs douleurs et éviter l’hospitalisation.
Si la majorité des patients arrive à se débrouiller pour trouver une activité physique (AP) qui lui convienne (yoga, marche, vélo, Pilates, tai chi, gymnastique volontaire, natation, etc), ce n’est pas toujours le cas pour certains patients.
Les raisons de manque d’AP sont diverses mais les plus fréquemment avouées sont généralement : « j’aime pas le sport », « je veux pas aller dans un club ou une salle de gym, c’est pas pour moi », « je rentre tard le soir », « j’ai pas le temps », « j’ai trop de choses à faire ». Il peut même arriver parfois que l’on avoue un manque de motivation (2).
En ce qui concerne le mal de dos et la sciatique, le manque de marche active (qui est différent du piétinement) augmente le risque de douleur forte. Pour faire simple moins on marche plus on a mal.
Marcher activement et parcourir 7500 à 10 000 pas par jour est la base du traitement. Le médecin peut prescrire des anti-inflammatoires mais ces médicaments ne font pas disparaitre la douleur éternellement. Il prescrit de la rééducation à faire par un masso-kinésithérapeute mais alors là attention sujet très sensible. Sur ce blog « je vais me mouiller » comme on dit. J’incite les patients et même mes confrères à être très vigilants sur la qualité de la rééducation du rachis. C’est là que commence la spécialité du dos.
Voici les objectifs spécifiques de rééducation du rachis et des membres inférieurs (pour le mal de dos commun et la sciatique) que je propose aux patients et aux professionnels de santé :
- rassurer sur l’absence de gravité
- éviter de conseiller des examens d’imagerie lorsque ceux-ci ne sont pas indiqués. Savoir expliquer pourquoi ils ne sont pas nécessaires et proposer un traitement efficace à la place.
- apprendre les techniques d’auto-rééducation : position neutre, fente avant, auto-grandissement, bascule du bassin, verrouillage lombaire.
- apprendre des exercices d’étirements et de gainage spécifiques qui soulagent rapidement la douleur.
- motiver le patient à pratiquer ses auto-exercices*, régulièrement si besoin.
- corriger les postures et les gestes. Comprendre quelles postures et gestes déclenchent la douleur selon son origine anatomique (pincements articulaires ou discaux).
- anticiper les situations qui risquent de déclencher de fortes douleurs. Savoir comment agir lorsque la douleur s’est déjà réveillée pour éviter de se retrouver bloqué.
Si votre médecin vous a prescrit des séances, qu’il n’a pas demandé quel était le contenu des 10 premières séances de kinésithérapie et que votre mal de dos (lombalgie commune ou lomboradiculalgie commune) persiste voire s’aggrave, montrez-lui cet article. Je sais par expérience que la formation au suivi de la rééducation du dos n’est pas spécifiquement obligatoire pour les médecins et que des zones d’ombre persistent dans toutes les régions du monde (3) alors que d’après moi c’est le traitement de référence, la solution.
Le problème le plus typique que j’ai rencontré jusqu’à présent, celui qu’ont rencontré les patients qui ont perdu leur travail après des années d’arrêt de travail, qui sont passés en invalidité, handicapés, infiltrés, opérés : c’est le manque de rééducation de qualité durable dès les 6 premiers mois de douleur quotidienne. En clair, si vous commencez la rééducation trop tard, ça se corse. Certes la dépression, la peur, les contraintes socio-économiques au travail, tout cela pèse aussi dans la balance (*) mais le plus important c’est de vous assurer d’une bonne rééducation dès le départ (4).
« le plus important c’est de vous assurer d’une bonne rééducation dès le départ »
Le moyen le plus communément accessible et remboursé sur le territoire français actuellement pour rééduquer les patients souffrant de mal de dos (lombalgie commune dès le stade subaigu) est la masso-kinésithérapie (5).
Kinésithérapie : kiné en grec signifie κίνησις , kinesis c’est-à-dire mouvement. Étymologiquement, c’est donc la thérapie par le mouvement.
Lorsque vous vous faites masser par le kiné c’est lui qui bouge, pas vous.
Lorsque vous êtes sur la table avec les infrarouges, coussin chauffant : vous êtes immobile.
Lorsque vous êtes sur la table avec les électrodes : vous êtes immobile.
Cela signifie que les patients qui ont mal au dos depuis des mois voire des années, qui prennent des médicaments antalgiques pour calmer des douleurs d’intensité supérieure à 5/10 tous les jours, voire qui sont en arrêt de travail et qui vont chez le kiné pendant 10 à 30 séances pour être massés, chauffés et mis sous électrodes à la chaine ne sont pas bien rééduqués. Massage, chaleur et électrodes c’est bien, ça soulage, mais je constate régulièrement que ça ne règle pas le problème et que des patients souffrent de façon chronique. Cet article ne concerne pas les personnes qui ont mal au dos seulement quelques jours.
Lorsque les résultats ne sont pas probants voire médiocres, que le rapport coût-efficacité pour l’assurance maladie commence à faiblir (consultations du médecin traitant, médicaments, kinésithérapie, avis de spécialistes, indemnités journalières versées au titre de congé maladie, plus ou moins pension d’invalidité), le problème est posé et plutôt que de s’en remettre au hasard, à la nature, au chamanisme ou pire plutôt que de faire culpabiliser le patient de ne pas faire ce qu’il faut comme je l’entends parfois, je propose une solution : l’Atelier Santé.
Les raisons pour lesquelles j’ai créé le premier Atelier Santé près de Vernon dans l’Eure sont :
- soigner les patients souffrant de mal de dos et sciatique avec un haut niveau de qualité des soins en proposant des cours d’éducation thérapeutique. J’y montre comment bouger son dos, je corrige les gestes et les postures. J’instaure un cadre de soin rassurant et motivant. J’ai créé et développé un programme d’auto-exercices standardisé qui donne d’excellents résultats en termes de soulagement et de coût-efficacité.
- en termes de santé publique : créer un modèle économique viable et un service accessible au plus grand nombre.
- respecter la volonté du Conseil de l’Ordre des Médecins qui interdit à un médecin de donner des cours collectifs en tant que médecin mais qui l’autorise à titre privé dans le cadre de services proposés par une société privée. Je ne pouvais pas dispenser ces cours dans mon cabinet médical donc j’ai créé un atelier santé.
- par extension proposer des cours collectifs pour soigner des pathologies chroniques liées au mode de vie stressant. Remise en forme par des éducateurs sportifs sous forme d’activités ludiques et attrayantes, pour les patients souffrants d’obésité, diabète de type 2, hypertension artérielle, lombalgie, sciatique. Méditation contre le stress, apprentissage du contrôle des émotions. EMDR (Eye Movement Desensitization and reprocessing) contre les crises d’angoisse et les traumatismes psychologiques (petits ou grands).
L’Atelier Santé fonctionne comme un cabinet de groupe où l’on pratique la gymnastique du corps et de l’esprit pour retrouver force et souplesse, sous contrôle médical. La principale différence avec les maisons de santé proposant de l’activité physique adaptée est que les maisons de santé sont financées par l’Etat et l’Europe donc elles ne sont pas rigoureusement indépendantes. Elles doivent respecter les règles imposées par les ARS (Agences Régionales de Santé) et consorts ce qui n’est pas forcément un mal en soi mais qui contraint le développement de l’art médical. On pourrait ainsi dire que l’Atelier Santé tient à son indépendance vis-à-vis des institutions et de l’industrie tout comme la revue Prescrire (journal médical français spécialisé le plus connu des médecins). L’Atelier Santé est donc du point de vue de son créateur une évolution de la médecine où le médecin n’est pas là pour prescrire ni examiner mais pour transmettre collectivement un savoir à un groupe de personnes partageant la même problématique de santé essentiellement chronique sur la base du volontariat.
« L’Atelier Santé est donc du point de vue de son créateur une évolution de la médecine où le médecin n’est pas là pour prescrire ni examiner mais pour transmettre collectivement un savoir à un groupe de personnes partageant la même problématique de santé »
La gymnastique du corps et de l’esprit est également proposée dans les centres de rééducation, les CHU (Centres hospitaliers Universitaires), en Education Thérapeutique du Patient en HDJ (Hôpital De Jour), en RFR (Restauration Fonctionnelle du Rachis), parfois aussi dans les centres de cure thermale. Tout ceci est efficace. L’inconvénient du système est que les patients y accèdent tardivement au bout de plusieurs années de souffrance du dos et de dégradation de la qualité de vie (ou parfois pas du tout), que ces structures financées en majorité par l’Etat coûtent plus cher à l’Etat que des professionnels indépendants et surtout que les résultats obtenus nécessitent un suivi en ville. Si le patient ne retrouve pas le même type d’activité autour de chez lui, la douleur peut revenir et parfois même le patient peut avoir besoin d’y retourner tous les ans (exemple des cures thermales remboursées et des programmes d’ETP (Education Thérapeutique du Patient).
Les soins ne sont pas remboursés actuellement par l’Assurance Maladie ni par les mutuelles. Je pense comme beaucoup de mes patients que la Sécurité Sociale gagnerait beaucoup à commander l’étude de l’efficacité et du rapport coût-efficacité des soins prodigués à l’Atelier Santé, c’est certain.
Dans une vision de développement à long terme, une fois leur efficacité prouvée, l’Atelier Santé (cours en présentiel) et la Méthode SAM (cours à distance, méthode née grâce à l’Atelier Santé) pourront bénéficier au plus grand nombre.
F.R, Juin 2020, www.doctogym.fr
Références bibliographiques :
*Auto-exercice : exercice physique ou mental à pratiquer par le patient sans la présence d’un professionnel.
Les propos cités dans cet article engagent la liberté d’expression du Docteur RICHARD et ne préjugent pas de la pratique de l’ensemble des professionnels de santé.
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